Roger‑Edgar Gillet
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texte de Pierre Alechinsky Galerie de France 1961

GILLET
TRAIT POUR TRAIT
Par Pierre Alechinsky


Peintre qui mit à l’honneur le pain de Dieppe, sorte de miche grossièrement imitée par les Flamands. Sa collection de croûtons fut célèbre en son temps. D’un voyage en Hainaut il rapporta un mémoire sur la décomposition de la lumière à travers un prisme de pain bis. Tout laisse supposer que vers 1830 un faux belge lui proposa une place de grand boulanger à l’Académie de Montbéliard, -berceau de la Pensée Bûl, cette « couque de l’esprit ». Aura-t-il décliné l’offre parce qu’il préférait à la sécurité la poursuite solitaire et parisienne de ses peintures d’épice et de munition ? Ses voisins de quartier, rue de Bruxelles, lui élevèrent une fort belle statue en mie laquée qui fait aujourd’hui encore l’admiration des peuples. Selon P. Bury, il est également l’auteur d’une phrase qu’on attribua longtemps à Bernardin de Saint- Pierre : « Nous venions de temps en temps, dans la belle saison, ma femme et moi, manger le soir une côtelette. » Figure emblématique : sur cette terre d’ombre, « Ne va pas sans mie, qui s’en peindre. » Caresser le gillet : se dit de la lecture d’une œuvre peinte à l’usage des aveugles, qui a trait à la compréhension d’une texture picturale. Avoir du gillet : posséder une belle pâte, exemple : cette peinture a du gillet ; populaire : ce pain a du gillet, est réussi.


Texte repris dans le catalogue de l’exposition de R.E. Gillet à la galerie de France en 1961